« Phénomène » de bizarrerie sur la plateforme Board Game Arena, La fin des artichauts sort de nos écrans pour rejoindre les kallax. Arrivé il y a peu sur nos étals, c’est un jeu qui a parfois été qualifié de « mon premier deckbuilding ». Loin des univers spatiaux ou heroïc fantasy habituels, il sera ici question de légumes, potager, compostage et donc, d’artichauts. Un jeu de construction de paquet sur ce thème, avouez-vous qu’on ne vous l’avait pas encore faite celle-là ?
Alors à quoi doit-on s’attendre ?
Le concept part d’une idée toute simple, à savoir, se débarrasser le plus vite possible de nos artichauts. Pourquoi ces légumes subissent ils une telle ségrégation ?
Toujours est-il qu’il va falloir faire votre marché, rajouter des légumes dans votre main et petit à petit épurer ou diluer votre deck afin, au moment de refaire sa main, de piocher 5 cartes qui ne soient pas des artichauts. Si l’un de vos adversaires y parvient avant vous, c’est la fin des haricots !
On retrouve donc les ingrédients majeurs de tout deckbuilding : marché, amélioration de notre deck, défausse et bannissement, pour rendre nos tours de plus en plus efficace.
Deckbuilding vs légumes, nous raconte t'on des salades ?
Le thème autour des légumes est particulièrement bien rendu. De manière surprenante, il est même complètement cohérent avec les actions effectuées pendant les tours. On prend une ou plusieurs nouvelles cartes dans le jardin pour les placer dans le potager, on joue une action pour envoyer un artichaut au compost. Le vocabulaire utilisé est parfaitement adapté pour rendre l’expérience accessible et compréhensible.
Les illustrations et ces petits légumes rendus vivants sont absolument choupis ! Les enfants (petits et grands) se régaleront en regardant la tête désabusée de l’oignon ou la « chevelure » bouclée du brocoli. L'humour est omniprésent, à commencer par le sous-titre sur la boîte "le jeu de cartes sans coeur".
Enfin, contrairement à sa version BGA, le jeu est lisible. On voit en détail nos actions, celles de nos adversaires, où vont nos cartes, si notre pioche est dense ou vide, combien d’artichauts il nous reste, etc... Ce qui est un gros défaut sur la plateforme virtuelle et qui génère une forte incompréhension. Fini les prises de choux quand les carottes sont cuites après 4 tours sans qu’on ait vraiment eu le temps de voir venir notre défaite.
Une fois les cartes connues, il est alors plus facile de programmer des stratégies. Soit à base de carottes, aubergines, patates ou autres oignons pour composter un maximum d'artichauts. Soit sur fond de dilution du deck, en abusant des maïs, petits pois ou poireaux pour récupérer des cartes supplémentaires. Combiner les deux sera souvent indispensable. Et plus ou moins imposé par les légumes disponibles dans le potager à votre tour de jeu. Mais il y a quasiment toujours une action intéressante à faire. Jamais un jeu n’aura été aussi bon pour votre régime alimentaire !
A y regarder de plus près, tout semble avoir été pensé aux petits oignons.
Hasard, chaos, combo : serait-ce la recette d'une bonne ratatouille ?
Chaque partie aura sa propre saveur. Selon les cartes, les adversaires, etc... Dans le monde ludique actuel où l’on répète le mot « rejouabilité » à l’envie, on peut se plaire à penser que l'on aura envie de le sortir régulièrement avec tout type de public.
Simplement, chaque expérience se révèlera bien différente. On va naviguer entre les parties parfaitement contrôlées où le plan se déroule sans accroc jusqu'à celles où l’on comprend dès le départ que la suite va être difficile et l'issue quasi inéluctable. Les frustrations peuvent être multiples. Voir ses adversaires se gaver de carottes en début de partie pendant que vous êtes au régime sec risque bien de vous courir sur le haricot ! Vécu aussi : jouer malicieusement une betterave afin de piocher un super légume dans la main de votre (jeune) adversaire pendant que le pauvre récupère un artichaut en échange... La rhubarbe pourrait lui monter au nez rapidement !
Le hasard du potager et le chaos induit par les actions des cartes jouées est présent et ne conviendra certainement pas à tout le monde, surtout aux maniaques du contrôle.
Heureusement, les parties sont courtes. A deux joueurs, comptez 10 minutes tout au plus. A peine plus quand on joue à trois ou quatre. Pas besoin de poireauter pendant des heures en voyant venir sa défaite à l’avance. En fonction de votre style et des joueurs avec vous, la table sera forcément animée. Le stress monte avant son tour, quand l'adversaire doit refaire sa main. Voir dans ses yeux la déception d'avoir au moins un artichaut provoque un sacré soulagement.
L’interaction peut être très forte (avec les poireaux et les betteraves notamment) et les coups d’éclats peuvent arriver sans prévenir. Par exemple, le pouvoir du poivron peut paraître faible, et inutile en début de partie. Mais réussir à en comboter un ou deux avec celui du maïs pour placer plusieurs cartes en haut de sa pioche avant le tour suivant, c'est très prenant. Et quand ça marche, une réelle satisfaction. De belles possibilités stratégiques s’offrent avec ces légumes. Avouez qu'on ne lit pas ça tous les jours !
Un jeu hyper frais ! Mais peut être pas pour tout le monde...
En s’aventurant dans le jardin, il ne faut pas oublier que le jeu s’adresse à un public (très) familial. Permettant de donner un avant-goût de ce que le mot deckbuilding, ce mot parfois un peu barbare utilisé à foison par les Ludicus Mordicus, signifie. Au passage, par moment, le jeu envoie des sensations plus proches de la défausse que de la construction de paquet.
Dans l’ensemble, entre le thème ultra cohérent, la fluidité des tours, la lisibilité des actions, La fin des artichauts est loin d’être un navet ! A la maison, on aime beaucoup et difficile de ne faire qu'une seule partie quand on est lancé.
Accessible au plus grand nombre par sa simplicité, il peut être aussi bien stratégique qu'hasardeux et un peu chaotique. Tout autant fun et jouissif qu’énervant et frustrant, il sera générateur d’émotions à coup sûr.
jujuOB
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